Logiciel pegasus : ce qu’il faut savoir sur ce spyware

logiciel espion pegasus

Le logiciel espion Pegasus, développé par la société israélienne NSO Group, représente une avancée technologique dans le domaine de la surveillance numérique. Conçu à l’origine pour aider les gouvernements et les agences de renseignement à lutter contre le terrorisme et la criminalité organisée, Pegasus a suscité une controverse mondiale en raison de son utilisation abusive pour espionner des opposants politiques, des journalistes et des militants des droits de l’homme.

Le logiciel pegasus embarque une technologie très puissante

Pegasus, conçu pour opérer de manière furtive, est basé sur une architecture complexe en trois niveaux, chaque niveau jouant un rôle essentiel dans son fonctionnement de surveillance. Cette structure lui confère une capacité d’espionnage à haute précision, permettant un contrôle total des informations collectées et une dissimulation efficace.

🖥 Niveau 1 – Station de travail : interface de contrôle et de surveillance

Le premier niveau, connu sous le nom de station de travail, constitue le poste de commandement des agents de surveillance. C’est ici que les opérateurs de Pegasus, souvent des agents de sécurité ou des analystes, configurent et dirigent les opérations de surveillance. Les agents utilisent une interface spécifique pour :

  • Identifier les cibles : En fonction de critères prédéfinis, ils peuvent choisir des appareils précis à surveiller.
  • Définir les modes d’infection : Les agents sélectionnent les techniques d’infiltration en fonction de la vulnérabilité de l’appareil visé, parmi des options comme le spear phishing ou l’attaque zero-click.
  • Gérer les données collectées : Depuis cette interface, ils accèdent aux informations personnelles recueillies, y compris les messages, appels, et données de géolocalisation.

Ce niveau comprend également des modules de cryptage et de dissimulation, intégrés pour masquer les activités de surveillance et éviter la détection par des systèmes de sécurité. Cela permet aux agents de contrôler Pegasus en temps réel sans laisser de traces visibles pour l’utilisateur de l’appareil ciblé.

🖧 Niveau 2 – Serveur d’infection : l’agent d’intrusion

Le deuxième niveau, souvent appelé serveur d’infection, est le cœur opérationnel du logiciel Pegasus. Ce serveur est dédié à la distribution et à l’exécution des modules d’infection du malware et peut agir rapidement en cas de mise à jour des vulnérabilités logicielles découvertes. Voici les rôles principaux du serveur d’infection :

  • Déploiement initial : Ce serveur génère et distribue le code malveillant vers les appareils ciblés, soit via un lien piégé, soit via des techniques zero-click qui exploitent les failles zero-day de logiciels comme WhatsApp ou iMessage.
  • Maintien de l’infection : Une fois installé, le serveur d’infection garantit que Pegasus reste actif sur l’appareil, même en cas de redémarrage ou de tentative de suppression.
  • Transmission des commandes : Les agents de surveillance envoient leurs ordres via ce serveur, qui relaie les commandes au malware installé pour activer le microphone, prendre des captures d’écran, accéder à des photos, ou encore écouter les appels.

Le serveur d’infection est particulièrement sophistiqué pour contourner les protocoles de sécurité et dispose de technologies avancées pour dissocier ses actions des opérations visibles sur l’appareil infecté, rendant Pegasus pratiquement indétectable par l’utilisateur.

☁️ Niveau 3 – Infrastructure cloud : stockage et traitement sécurisé des données

Enfin, le troisième niveau de l’architecture Pegasus repose sur une infrastructure cloud, qui est principalement hébergée par des fournisseurs comme OVH et Amazon Web Services (AWS). Cette infrastructure cloud a un rôle fondamental dans la sécurisation et la gestion des données interceptées. Elle offre plusieurs fonctionnalités critiques pour le bon fonctionnement de Pegasus :

  • Stockage à long terme des données : Les données collectées (textes, enregistrements audio, emplacements GPS, etc.) sont transférées vers le cloud, permettant aux agents de les consulter de manière sécurisée depuis leur station de travail.
  • Cryptage des informations : Pour éviter toute fuite d’informations sensibles, les données sont cryptées avant d’être stockées dans le cloud. Pegasus utilise des algorithmes de cryptage de pointe pour garantir la confidentialité et empêcher toute interception par des tiers.
  • Analyse en temps réel : Grâce aux capacités de traitement offertes par le cloud, les données sont immédiatement analysées et filtrées, permettant de produire des rapports instantanés sur les activités suspectes des cibles.

De plus, cette infrastructure cloud bénéficie d’une élasticité qui permet d’adapter les ressources en fonction de la quantité de données interceptées, offrant ainsi un stockage et un traitement évolutifs. L’hébergement sur des serveurs tiers comme AWS ajoute une couche de dissimulation, rendant plus difficile l’identification de Pegasus et l’origine des commandes envoyées.

architecture logiciel espion pegasus

Les procédées de pegasus pour infecter un appareil

Pegasus peut infecter un appareil mobile de manière discrète, en utilisant des méthodes avancées qui exploitent les failles des logiciels. Voici les principales techniques utilisées :

·  📩 Spear Phishing ciblé : Pegasus peut être introduit via un message contenant un lien malveillant envoyé par SMS, iMessage ou d’autres canaux de messagerie. Lorsqu’un utilisateur clique sur le lien, le logiciel malveillant utilise une faille de sécurité dans l’application de messagerie ou dans le système d’exploitation pour s’installer discrètement sur l’appareil. Ce type d’attaque nécessite une interaction de l’utilisateur, mais son efficacité réside dans la personnalisation des messages pour paraître légitimes.

·  🌐 Redirection web détournée : Pegasus utilise également des attaques par redirection en ligne, où l’utilisateur est discrètement redirigé vers une URL de déploiement du malware. Cette URL, différente de celle que l’utilisateur souhaitait initialement consulter, active des scripts malveillants qui exploitent les vulnérabilités du navigateur ou du système d’exploitation pour permettre l’infection automatique de l’appareil.

·  📶 Exploitation des vulnérabilités zero-click : Depuis 2018, NSO a perfectionné les attaques « zero-click », qui permettent à Pegasus de s’installer sans aucune interaction de l’utilisateur. Cette technique repose sur l’exploitation de failles zero-day, souvent dans des applications largement utilisées comme WhatsApp, iMessage ou Apple Music. En utilisant ces vulnérabilités non corrigées, Pegasus peut s’introduire directement dans l’appareil cible et prendre le contrôle sans nécessiter d’action de l’utilisateur. Ce type d’attaque est particulièrement insidieux, car il est difficile à détecter et ne laisse aucune trace visible pour l’utilisateur.

·  📡 Transmissions via émetteur-récepteur sans fil : Pegasus peut être déployé par un émetteur-récepteur à proximité de l’appareil cible. Cette méthode utilise des technologies de communication sans fil avancées pour installer le spyware lorsque l’appareil se trouve dans la portée du signal. Il s’agit d’un processus entièrement passif pour l’utilisateur, mais il nécessite une proximité physique, ce qui en fait une méthode adaptée aux cibles localisables.

·  🖐 Installation physique manuelle : En dernier recours, l’infection peut être réalisée par une intervention manuelle, si le smartphone de la cible est temporairement accessible. Cette méthode est plus directe et peut être utilisée pour contourner les mécanismes de sécurité avancés d’un appareil. Une fois l’accès physique obtenu, le spyware est installé localement, ce qui permet un contrôle complet et instantané des données sans possibilité pour l’utilisateur de détecter l’intrusion.

Qui sont les cibles du spyware pegasus ?

Pegasus est principalement utilisé par divers États et services de renseignement (FBI, Mossad…) à travers le monde, ce qui illustre son rôle en tant qu’outil de surveillance étatique. Parmi les pays connus pour avoir recouru à ce logiciel, on trouve :

  • Allemagne
  • Espagne
  • Arabie Saoudite
  • Azerbaïdjan
  • Bahreïn
  • Émirats Arabes Unis
  • Hongrie
  • Inde
  • Kazakhstan
  • Maroc
  • Mexique
  • Panama
  • Pologne
  • Rwanda
  • Ghana
  • Togo
  • Salvador

Ces pays varient considérablement en termes de politique et de régime, allant de démocraties établies à des régimes autoritaires. L’usage de Pegasus par ces gouvernements est souvent justifié par la nécessité de lutter contre le terrorisme, le crime organisé et d’autres menaces à la sécurité nationale.

Utilisation contre le crime organisé et le terrorisme

NSO Group, l’éditeur de Pegasus, positionne le logiciel comme un instrument essentiel pour les agences de sécurité. Il est revendiqué que ce logiciel espion a contribué à des opérations marquantes, notamment l’arrestation de figures criminelles comme Joaquín « El Chapo » Guzmán, le célèbre chef du cartel de Sinaloa au Mexique. En facilitant la surveillance des communications, Pegasus permettrait aux forces de l’ordre de recueillir des informations critiques pour des enquêtes complexes, ciblant ainsi des réseaux criminels et terroristes.

Cependant, cette utilisation se heurte à des préoccupations éthiques croissantes. La capacité de Pegasus à infiltrer et surveiller les appareils de manière indétectable soulève des questions sur les abus potentiels et l’atteinte à la vie privée des citoyens.

Espionnage d’opposants et atteinte aux droits de l’homme

Malgré son objectif affiché, de nombreux rapports, notamment ceux du laboratoire Citizen Lab, révèlent que Pegasus est également utilisé pour surveiller des cibles bien au-delà du crime organisé. De nombreux gouvernements ont été accusés d’employer ce logiciel pour espionner des opposants politiques, des militants des droits de l’homme et des journalistes.

Ces utilisateurs sont souvent ciblés dans le cadre d’efforts pour étouffer la dissidence et contrôler la narration publique. Des cas notables incluent :

  • Jamal Khashoggi : Le journaliste saoudien, qui a été assassiné en 2018, aurait été espionné à l’aide de Pegasus avant son meurtre.
  • Militants pour les droits de l’homme : Des activistes en Afrique, au Moyen-Orient et en Asie ont rapporté avoir été surveillés par leurs gouvernements respectifs grâce à ce logiciel, compromettant leur sécurité personnelle et entravant leurs efforts de plaidoyer.

L’utilisation de Pegasus à ces fins soulève des préoccupations alarmantes concernant la liberté d’expression, le droit à la vie privée et la sécurité des journalistes et des défenseurs des droits de l’homme. De nombreuses organisations internationales, y compris Amnesty International et Human Rights Watch, ont appelé à une réglementation plus stricte sur la vente et l’utilisation de technologies de surveillance comme Pegasus, plaidant pour une plus grande transparence et des protections contre les abus.

mode infection pegasus

Quel est le prix de la licence du spyware Pegasus ?

Le modèle tarifaire de la licence Pegasus reflète la complexité et la sophistication de ce logiciel d’espionnage. Voici un aperçu des coûts associés à son utilisation :

💵 500 000 $ : Ce montant représente les frais d’installation initiaux, nécessaires pour mettre en place l’infrastructure et les outils indispensables à l’activation du spyware. Ce coût inclut généralement des services de formation et d’assistance technique pour garantir que les utilisateurs puissent tirer pleinement parti des capacités de Pegasus.

📱 650 000 $ : Ce tarif est applicable pour cibler jusqu’à 10 appareils, qu’ils soient sous Android ou iOS. Cela permet aux agences de renseignement ou aux entités gouvernementales d’accéder à des informations stratégiques sur un nombre limité d’individus clés sans avoir à investir dans des licences pour chaque appareil séparément.

📈 Pour des cibles additionnelles, le coût est ajusté selon le volume :

  • 800 000 $ pour 100 cibles supplémentaires, ce qui donne une flexibilité aux clients qui souhaitent élargir leur champ d’action.
  • 500 000 $ pour 50 cibles.
  • 250 000 $ pour 20 cibles.
  • 150 000 $ pour 10 cibles supplémentaires.

Ces tarifs sont conçus pour permettre aux utilisateurs de s’adapter à leurs besoins spécifiques tout en offrant une structure de prix échelonnée qui facilite l’expansion des opérations d’espionnage.

Approbation réglementaire

Un élément important à souligner est que chaque vente de Pegasus doit être approuvée par le ministère israélien de la Défense. Cette exigence réglementaire vise à contrôler la distribution du logiciel et à s’assurer qu’il n’est pas utilisé à des fins abusives. En conséquence, les clients doivent passer par un processus d’évaluation qui inclut la justification de la nécessité d’une surveillance ciblée. Cela reflète également la reconnaissance par les autorités israéliennes des implications éthiques et politiques liées à l’utilisation de technologies de surveillance avancées.

Comment détecter le logiciel Pegasus sur un smartphone?

Repérer Pegasus sur un smartphone est extrêmement difficile, voire impossible, en raison de sa capacité à masquer sa présence. Cependant, certains indices peuvent trahir une infection potentielle :

  • 🔋 Consommation excessive de batterie : Un smartphone qui s’épuise rapidement pourrait indiquer une activité en arrière-plan.
  • 💾 Utilisation inhabituelle de la RAM : Pegasus utilise intensément les ressources, ce qui se traduit par une augmentation de la mémoire vive.
  • 📶 Augmentation de la consommation de données : Si un appareil transmet soudainement des volumes de données élevés sans raison apparente, cela peut signaler une fuite de données causée par Pegasus.

Les gestes à faire pour prévenir le spyware Pegasus

Pour se protéger contre l’infiltration de Pegasus, il existe plusieurs bonnes pratiques à adopter :

  • Éviter de cliquer sur des liens suspects : Les utilisateurs doivent être vigilants et éviter de cliquer sur des liens dans des messages, des e-mails ou des publications sur les réseaux sociaux d’origine douteuse.
  • Utiliser des applications de messagerie sécurisées : Privilégier des applications de communication qui offrent un chiffrement de bout en bout, comme Signal ou Telegram, peut réduire le risque d’infection.
  • Activer la vérification en deux étapes : Renforcer la sécurité des comptes en ligne grâce à la vérification en deux étapes peut offrir une couche supplémentaire de protection contre les accès non autorisés.
  • Mettre à jour régulièrement les applications et le système d’exploitation : Les mises à jour régulières garantissent que l’appareil est protégé contre les vulnérabilités connues.
  • Limiter l’accès physique à l’appareil : Éviter de prêter son smartphone à des personnes non fiables et garder un œil sur ses appareils lors de déplacements peut réduire le risque d’infection manuelle.

Les chiffres et faits marquants sur le logiciel Pegasus

L’impact de Pegasus sur le paysage de la cybersécurité et de la vie privée est colossal. Voici quelques statistiques et faits marquants qui illustrent l’ampleur de ce phénomène :

  • 45 000 smartphones infectés à travers le monde : Cette estimation met en lumière l’étendue de l’infiltration de Pegasus, touchant des individus de divers horizons, allant des personnalités politiques aux journalistes, en passant par des activistes et des citoyens ordinaires.
  • Plus de 20 pays ayant acquis la licence de Pegasus : Ce chiffre souligne la popularité de Pegasus parmi les gouvernements et les agences de renseignement, avec des nations telles que l’Arabie Saoudite, l’Inde, le Mexique et l’Espagne parmi les acheteurs notables. Cela démontre également que le logiciel est utilisé dans des contextes variés, souvent à des fins de surveillance et de contrôle.
  • 1,5 million de dollars par client pour un déploiement complet : Ce coût inclut l’installation et la formation, ainsi que les frais pour cibler un certain nombre d’appareils. L’investissement conséquent nécessite une justification substantielle de la part des acheteurs, qui doivent prouver l’urgence et la nécessité de l’accès à des informations sensibles.
  • Taux de succès élevé d’infection : Pegasus est réputé pour son efficacité redoutable, avec un taux de succès d’infection atteignant jusqu’à 95 % dans certaines cibles identifiées, selon des sources de recherche en cybersécurité. Ce chiffre souligne la sophistication des techniques d’intrusion utilisées.
  • Vulnérabilités exploitées : Pegasus a tiré parti de plus de 30 vulnérabilités zero-day (des failles de sécurité inconnues des éditeurs de logiciels) dans des applications largement utilisées comme WhatsApp, iMessage, et Facebook. Ces vulnérabilités permettent une infiltration sans intervention de l’utilisateur, rendant le spyware particulièrement difficile à détecter.
  • Réseau de distribution : Le logiciel espion est souvent intégré dans des réseaux d’espionnage plus larges, avec des infrastructures sophistiquées qui facilitent le ciblage de masse. Les services de renseignement, tels que le Mossad israélien et la CIA, sont des exemples de clients potentiels qui pourraient utiliser Pegasus pour des opérations de surveillance.
  • Impact sur la vie privée et les droits de l’homme : Les révélations concernant l’utilisation de Pegasus ont provoqué des manifestations mondiales et des critiques des organisations de défense des droits de l’homme. Des rapports indiquent que des dizaines de journalistes et d’activistes ont été ciblés, suscitant des inquiétudes quant à l’impact sur la liberté d’expression et la vie privée.

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